Et "le Manager" dans tout ça, au coeur de cette crise Covid… ?  Que devient-il ? 

Lorsque l’on qualifie la pandémie Covid-19 de « crise », on imagine un début et une fin, alors que personne n’est en mesure de connaitre véritablement quand et comment cette fin interviendra.

Les chamboulements sociaux-professionnels qu’elle occasionne sont incommensurables et multiples, on peut d’ailleurs s’interroger sur le fait d’en connaître vraiment un jour, toutes les répercussions.

La Covid-19 fait l’effet d’un défi lancé à l’humanité, et comme d'un énorme caillou jeté au milieu d'un lac qui n’en finit pas de faire des ricochets.

Cette crise est arrivée soudainement, sans crier gare. Personne ne l’attendait et pourtant du jour au lendemain, elle a bousculé le mode de vie, l'organisation familiale, sociale, professionnelle etc… le mode de travail, le rythme, l’environnement, la logistique etc….tous les aspects de la vie quotidienne.

Au cœur de la crise, le confinement, puis le déconfinement de l’humanité ont obligé les organisations, privées ou publiques à s’adapter, à se réorganiser, à innover, à créer, à toute vitesse, une course contre la montre, avec une priorité, la réalité économique : relancer la machine au plus vite, la rendre à nouveau productive, rattraper le chiffre d’affaires perdu, limiter les dégâts, les compenser.

A ce titre, le Manager est un élément central puisqu’il devient en quelque sorte, le chef d’orchestre, agitant sa baguette dans tous les sens au centre d'un concert tonitruant, essayant d'harmoniser les instruments pour qu'ils délivrent une musique la plus harmonieuse possible : garder le cap, répertorier les collaborateurs dans leur contexte professionnel, identifier leur situation familiale, sanitaire, organiser le travail sur de nouvelles bases, des réunions à distance, s’assurer des outils adéquats de chacun pour le travail à domicile, revoir les objectifs, innover, adapter les stratégies…

Sur ses épaules repose aussi la tâche de relancer la dynamique des équipes : identifier chaque problématique personnelle, chaque état de stress ou d’anxiété mal contrôlés… assurer un lien régulier, un suivi rassurant, cadrant, fédérateur. Il doit alors mettre en action son savoir-faire et plus encore, son savoir-être.

Plus que jamais donc, le cocktail des soft-skills dont tous les RH rêvent, revêt l’aspect du précieux graal…car le manager doit savoir manier habilement toutes les intelligences, qu'elle soit émotionnelle, culturelle, collective, participative, comportementale. Il doit faire preuve d’empathie, d’écoute, de créativité…sans jamais perdre de vue ses fonctions habituelles, décider, trouver des solutions, négocier, emmener avec lui une équipe pour atteindre des objectifs précis.

Oui mais voilà, pour faire tout ça, comment fait-il ?   Pourrait-t-on imaginer qu’il ne puisse y parvenir ?  

Comment va-t-il, lui, le Manager, dans cette période inédite ? Qui s’en occupe, qui s’en préoccupe ?

On peut se mettre des œillères, ne pas voir ou ne pas vouloir voir, ne pas savoir. Oui, on peut toujours, mais c’est risqué. On peut exiger de lui qu'il résolve tous les problèmes, qu'il ait à chaque fois la bonne attitude, la bonne décision pour chacune et chacun, qu'il soit opérationnel de tous côtés, qu'il soit un magicien en quelque sorte mais ce sera sur le fil du razoir, c'est évident.

Car voilà, le Manager est avant tout un individu. Et comme tout individu, il a subi ou subit encore, un traumatisme. La crise Covid crée des traumas. Les professionnels de la santé mentale le confirment car ils sont beaucoup plus  sollicités qu'avant, pour des cas de personnes aux troubles divers, du stress, des angoisses…des personnes qui veulent être aidées, quelle que soient les conditions matérielles, sociales, affectives dans lesquelles ils ont vécu le confinement et vivent encore cette période.

Les traumas s’installent de façon insidieuse, ils ne sont pas toujours conscientisés. Chacun ou chacune se croit fort (e),  se dit qu'il ou elle s'en sort plutôt pas mal. Et pourtant…

Pourrait-t-on imaginer qu’il en soit autrement ? L’humanité confinée, mise au pied du mur, contrainte et forcée de s’enfermer des semaines durant. Perdre un être cher, ne pouvoir être à ses côtés jusqu’à la fin, voir son conjoint, un fils, une sœur, se faire licencier, avoir à travailler de chez soi alors que le « chez soi » est exigu, nécessite des travaux, ne permet pas de s’isoler correctement d’enfants en bas âge…ne plus voir ses collègues ou beaucoup moins et ne communiquer qu’à travers un écran devant lequel on se sent parfois mal à aise…., mettre un masque des heures entières de la journée. Le phénomène est inédit, planétaire, universel, simultané et surtout, il laisse place aux incertitudes et aux peurs.

Il s’agit aussi là, d’une histoire individuelle, chaque situation est unique car chaque personne va la vivre de façon différente et dans des conditions qui lui sont propres. Chaque personne sera armée différemment pour surmonter la crise, certains vont s’en sortir mieux que d’autres mais tout individu doit subir une situation qu'il n'a pas choisie.

Une chose est sûre, le Manager n’échappe pas à la règle. Pour relancer la machine, épauler les autres, les guider et exiger le meilleur d’eux-mêmes au coeur de la crise Covid, il va falloir aussi, dans bien des cas, l’épauler, le comprendre, le guider, pour exiger le meilleur de lui-même.

Donner ou redonner du sens, favoriser la créativité, la motivation, la productivité, ne se fera qu'à ce prix-là.

Ne l’oublions pas.